RE: What can we do to improve food security data? | Eval Forward

Je remercie sincèrement les participants et les diverses contributions au débat lancé depuis le 4 juin 2019 sur « What can we do to improve food security data ? ». La moisson a été bonne, parce que plusieurs situations nationales déplorables ont été rapportées et, heureusement, une solution intéressante a été révélée.

En effet, à partir du programme Nema en Gambie, Paul Mendy informe que la capacité du personnel d’évaluation à rassembler et à rendre compte de la sécurité alimentaire et nutritionnelle n’est pas à la hauteur de la tâche. Le même constat est fait en Inde où Archana Sharma rapporte que la plupart des recenseurs, enquêteurs et agents de terrain travaillent non seulement dans de mauvaises conditions, mais également ils vivent dans des conditions défavorables, ne sont pas suffisamment orientés vers le problème et n’ont accès à aucun type de formation aux outils, techniques, méthodologies, approches et processus impliqués dans la collecte de données. Il s’agit de travailleurs mal rémunérés. La conséquence est que les enquêteurs remplissent des enquêtes en fonction de leurs biais ou des biais d’enquête attendus (Richard Tinsley). Le résultat est que les données sont pleines de biais et peu fiables, mais cohérentes avec la situation financière du pays. Il suggérait alors d'extrapoler à partir de projets gérés par des ONG assistées par des donateurs et disposant d'un budget suffisant pour gérer une enquête fiable, pendant que Archana Sharma trouve que l'agence de recherche ou d'évaluation devrait investir proportionnellement dans les enquêteurs de haut de gamme et le personnel sur le terrain pour une collecte de données de qualité.

Il y a donc besoin que nos politiques en matière d’agriculture et de distribution alimentaire soient fondés sur le bon sens et les normes de nutrition soient fondées sur les besoins alimentaires des populations locales conformes à leur culture alimentaire (Lal Manavado). Dans la même logique, Kebba Ngumbo Sima alerte qu’il est grand temps qu’une attention soit accordée au contexte des communautés locales ou des peuples autochtones et à leurs perceptions et compréhensions liées aux questions de sécurité alimentaire. Or, à cause du volume de travail qu’impose l’Agenda 2030 aux pays, le résultat dépendra réellement a) de la possibilité et de la volonté des gouvernements d’investir dans la collecte de données, b) de l’assistance financière et technique que les bureaux nationaux de statistique pourront obtenir des organisations régionales et internationales (Filippo Gheri). De nombreux facteurs doivent être pris en compte lors du choix de l'indicateur à utiliser pour suivre l'insécurité alimentaire, ainsi que le type de données à collecter pour obtenir l'indicateur. Un indicateur doit être facile à utiliser, fournir des informations en temps voulu, être éclairé par des données faciles à collecter (rentables). Il devrait aussi fournir des informations valides et fiables. Ces caractéristiques sont très difficiles à trouver dans les indicateurs visant à «mesurer» l’insécurité alimentaire. C'est pourquoi l'équipe des statistiques de la sécurité alimentaire et de la nutrition de la FAO a lancé en 2013 le projet « Voices of the Hungry » (http://www.fao.org/in-action/voices-of-the-hungry/fr/#.XR8CpeQ8Too) qui a permis de mettre au point un nouvel outil appelé « Echelle de mesure de l'insécurité alimentaire vécue » ou « Echelle de mesure de l’insécurité alimentaire basée sur les expériences (FIES) », devenu l’indicateur 2.1.2 des objectifs de développement durable. Ce nouvel outil est selon Filippo Gheri direct, facile à utiliser, à faible coût et statistiquement valable. Cela permet également de distinguer les niveaux de gravité, de subdiviser les résultats et de comparer les résultats entre les pays et dans le temps. Le module de l’enquête fondée sur la FIES a déjà été inclus dans plus de 50 enquêtes représentatives au niveau national dans le monde et 60 autres pays ont déjà prévu de l’inclure dans leurs enquêtes nationales.

En somme, les problèmes de fiabilité des données sur la sécurité alimentaire se posent partout dans les pays sous-développés. Cela est dû au faible investissement des Etats dans cette activité ; ce qui se traduit par l’utilisation d’agents de peu de qualité. Mais, l’outil FIES est une solution intéressante pour corriger la situation, parce qu’il permet de réduire significativement les biais de collecte. L’outil FIES est appliqué tant sur le mois, le trimestre ou les 12 derniers mois ; ce qui corrigerait les biais soulevés au sujet des variations de la situation alimentaire des ménages et des individus entre les saisons de l’année. Il est donc indispensable et urgent que beaucoup de spécialistes de la sécurité alimentaire et de l’évaluation du développement soient formés à l’utilisation efficace de cet important outil en vue de l’amélioration des pratiques de collecte de données sur les indicateurs et de l’atteinte à l’horizon 2030 de l’ODD 2 notamment. 

Dr Emile N. HOUNGBO