RE: Évaluation rapide pour mesurer l'impact de la pandémie COVID dans les zones montagneuses | Eval Forward

Chère communauté,

Merci à Malika pour avoir émergé cette problématique de l'évaluation rapide, qui montre encore une fois les difficultés que nous rencontrons souvent dans la mise en oeuvre pratique de certaines notions théoriques. 

Mon point de vue sur la question est celui d'un acteur institutionnel et non celui d'un consultant. Au Bénin nous avons démarré la conduite d'évaluations rapides, une notion nouvelle à laquelle nous avons été exposés en Afrique du Sud avec le Programme "Twende Mbele" (programme de coopération en évaluation que nous avons initié avec l'Afrique du Sud et l'Ouganda pour le renforcement de nos systèmes nationaux de suivi-évaluation à-travers le partage d'expérience et le développement d'outils collaboratifs). 

C'est dans le cadre de ce programme que nous avons développé un guide méthodologique spécifique sur ce type d'évaluation et avons entrepris simultanément 4 évaluations rapides dont 3 concernent des interventions publiques et la 4ème est relative aux effets du COVID-19 sur le secteur informel.

Il faut dire tout d'abord, que la différence majeure entre l'évaluation rapide et celle traditionnelle réside dans les contraintes de temps et de ressources limitées qui caractérisent l'évaluation rapide. Au Bénin par exemple, une évaluation normale (hormis les évaluations d'impact qui peuvent aller jusqu'à 5 ans) dure en moyenne 9 mois à 1an, voire plus, à cause de beaucoup de facteurs liés aux procédures (notamment l'administration, la passation de marché, la gestion institutionnelle surtout quand il y a beaucoup de parties prenantes), et parfois même à la phase de collecte et d'analyse des données qui se prolonge souvent. L'évaluation rapide appelle donc de mettre en place de nouveaux processus pour réduire le temps des phases avant et après la collecte des données. Avec l'adaptation que nous avons faite au Bénin, on a estimé à 12 semaines maximum le temps global d'une évaluation rapide. Cela implique une période de collecte de données d'un maximum de deux semaines à un mois, afin de laisser du temps pour les activités initiales, l'organisation de la collecte de données, l'analyse des résultats, la rédaction d'un projet de rapport, l'obtention d’observations et la finalisation du rapport. Toutefois, c'est à l'épreuve des faits que nous allons voir si cela est réaliste.

Pour ce qui est des outils, le déficit en termes de temps et de portée peut être comblé par l’utilisation de méthodes rapides : 

  • Collecte avec des groupes (plutôt que des individus), ateliers,
  • Utilisation de données de routine ou d’autres évaluations,
  • Travail en équipe pour mener différentes étapes de front (Collecte et traitement)

De plus, nous estimons, que pour effectivement gagner du temps, il est préférable que l'évaluation rapide se fasse par une équipe interne, parce que c'est la seule option qui ne nécessite pas une procédure de passation de marché. Mais cela nécessite que des mécanismes organisationnelles idoines soient mis en place, par exemple :

  • un organigramme de projet pour l'équipe, 
  • l'aménagement du temps de travail hebdomadaire à consacrer à la mission d'évaluation et des délais de livraison rigoureux,
  • des mesures d'accompagnement de l'équipe, etc.

Par ailleurs, l'équipe d'évaluation ne résidant pas dans les communautés, nous avons identifié des points focaux dans les milieux de collecte de données pour assurer la facilitation avec les membres des communautés afin de gagner du temps.

Au demeurant, Malika n'a pas été suffisamment précise pour nous permettre de proposer des approches de solution adaptées à son contexte. Mais du peu que j'ai retenu, voilà quelques idées que je partage pour le moment. Je pourrais apporter plus d'éléments factuels lorsque nous aurons tiré les leçons de l'expérience actuellement en cours au Bureau de l'Evaluation des Politiques Publiques du Bénin. 

Merci et bon courage à tous.

Elias SEGLA