RE: The pervasive power of western evaluation culture: how and in what ways do you wrestle with ensuring evaluation is culturally appropriate and beneficial to those who legitimise development aid? | Eval Forward

Merci infiniment à Ana Urgoiti pour avoir mentionné les directives d'EvalIndigenous que j'utilise dans mon travail.

En tant que membre fondateur du réseau mondial EvalIndigenous (https://evalpartners.org/evalnetworks/evalindigenous/), j'aide les communautés autochtones et les évaluateurs du monde entier à faire entendre leur voix dans les processus de développement social et économique et à faire respecter leurs droits humains. Je mets l'accent sur l'approche ascendante qui consiste à travailler davantage avec les personnes au niveau de la base afin de leur donner des compétences d'évaluation.

Pour soutenir la démocratie, jouir de la paix dans le monde entier et réussir la mise en œuvre des objectifs de développement durable, une approche complète est nécessaire en évaluation. Mes collègues évaluateurs autochtones et moi-même plaidons de plus en plus auprès des autres évaluateurs et institutions de développement en faveur de l'idée selon laquelle les communautés autochtones peuvent à la fois apprendre et enseigner. Nous travaillons avec des communautés autochtones qui sont en marge du système d'évaluation mondial.

Personne ne doit être laissé de côté dans les processus de développement et d'évaluation. Les communautés fortunées ou les pays du Nord n'ont pas le monopole des connaissances et des solutions aux défis mondiaux. Les pays du Nord sont les plus grands consommateurs de produits mondiaux et les plus grands contributeurs au changement climatique. Un grand nombre des défis auxquels les communautés autochtones se trouvent confrontées dans le monde entier peut être imputé directement aux pays du Nord. Le système d'évaluation est dominé par des notions d'enquête des pays du Nord-occidentales-patriarcales-blanches-privilégiées (comme cela est montré, par exemple, dans Evaluation Roots). Il a longtemps été complaisant avec la démocratie défaillante et le paradigme de développement qui a conduit la planète au bord de la catastrophe. Nous sommes un village planétaire et la majorité lutte pour mettre un terme au racisme systématique et autres ismes des principaux systèmes de développement mondial. Nous avons besoin de changement dans notre manière de pratiquer l'évaluation. Les connaissances autochtones nous ont donné les principes permettant d'entrer en relation avec les autres et avec notre environnement. La plupart des objectifs de développement durable se retrouve dans les modes de vie des communautés autochtones. Le mode de vie des communautés autochtones africaines est fondé sur la philosophie Ubunu qui nous enseigne à nous aimer les uns les autres (j'existe car tu existes) et notre planète.

Ici, en Zambie, j'ai remarqué qu'il y a beaucoup de communautés où des interventions de développement sont menées par les ONG et le gouvernement, mais sans que les populations locales ou les bénéficiaires ne soient impliqués dans les conceptions, les mises en œuvre et les évaluations de ces interventions. Nous avons connu l'esclavage, le colonialisme et maintenant l'indépendance politique mais la majorité des personnes vit encore à l'ère de l'esclavage. Les institutions royales et les élites (y compris les évaluateurs) semblent se complaire dans le paradigme du sous-développement. La démocratie a été séquestrée par quelques-uns et les évaluateurs font partie du système de justification. Puis-je rappeler à ceux qui célébraient l'Afrique du Sud comme la promotrice du suivi et évaluation en Afrique que cela ressemblait beaucoup au vernis de la chrétienté? Il y avait en effet un département de l'évaluation au sein du Bureau du Président. Toutefois, est-ce que cela a changé quelque chose au fait que Jacob Zuma traite l'Afrique du Sud comme sa chefferie personnelle tout comme ses acolytes qui se sont emparés des entreprises publiques? De l'autre côté, le Zimbabwe qui compte le plus grand nombre de personnes instruites en Afrique, a été ruiné par le Président le plus instruit du monde, Robert Mugabe. Ici, en Zambie, nous avons créé un Ministère du développement national avec un secteur dévolu à l'évaluation. Le ministère a été supprimé à la fin de 2021 et l'évaluation a été reléguée à un coin sombre du Ministère des finances.

Les évaluateurs se précipitent pendant quelques jours vêtus du chitenge local, pour serrer la main des personnes âgées et hocher la tête poliment d'une manière qu'ils pensent être une réponse culturelle et cochent leurs listes de vérification d'évaluation. Même les Africains qui effectuent ce type de visites de terrain ont tendance à se comporter comme des sociologues venant de la terre de glace où le soleil ne se couche pas pendant six mois. Ils laissent les chargés de projet faire défiler devant eux les bénéficiaires qu'ils ont sélectionnés pour parler positivement du projet. Ils discutent avec les fonctionnaires de la bonne gouvernance et de la mise en œuvre de l'un ou l'autre des programmes mondiaux et sont conduits dans des endroits où ils peuvent faire des selfies pour montrer qu'ils sont allés en Zambie et ont fait la course avec un guépard mais ils n'ont pas le temps de sortir des bureaux et voitures climatisés pour se rendre dans les villages et demander au citoyen ordinaire ce qu'il pense de tous ces indicateurs de bonne gouvernance et de mise en œuvre des ODD par leur gouvernement. Ainsi, nous avons tendance à avoir des évaluations et des recherches qui sont très éloignées des réalités de la majorité des personnes dans les communautés. Les rapports sont impressionnants d'un point de vue graphique et statistique mais valent moins qu'un épi de maïs asséché et décortiqué ou qu'un bout de papier toilette du village pour un citoyen ordinaire.

Nous disposons de systèmes d'évaluation autochtones. Toutefois, les pratiques d'évaluation actuelles les ignorent totalement. Ceux qui les connaissent et voudraient les utiliser n'ont pas le pouvoir d'insister pour leur utilisation. L'élaboration du système d'évaluation national est guidée par les donateurs. Alors que la Déclaration de Paris de 2005 sur l'efficacité de l'aide a comme principe le transfert des responsabilités aux populations locales, peu de choses ont changé durant les deux dernières décennies. Les États africains et l'Union africaine dépendent trop des financements externes pour le suivi et l'évaluation. Ils croient que c'est un rituel à pratiquer pour montrer aux institutions externes l'existence d'une bonne gouvernance. Ils ne défendent pas les méthodologies d'évaluation créées en Afrique. Les organisations volontaires pour l'évaluation professionnelle sur le continent africain parlent des méthodologies locales lors de conférences et dans les espaces universitaires mais ne peuvent pas défendre leur utilisation dans les faits. Elles sont principalement aux prises avec la difficulté d'assurer leurs activités quotidiennes. Les organisations volontaires pour l'évaluation professionnelle peinent à survivre en mobilisant des ressources pour leurs activités auprès des membres et des philanthropes locaux. Elles n'ont même pas les moyens d'assurer que les évaluateurs réalisent des évaluations de qualité élevée et protègent les intérêts de toutes les parties prenantes.

Ainsi, EvalIndigenous a préparé un guide succinct pour aider les communautés autochtones et tribales qui ne sont pas toujours à même de participer aux processus de développement et d'évaluation dans leurs communautés. Je n'en suis pas l'auteur mais il s'agit d'un produit d'EvalIndigenous. Voici les questions que les communautés pourraient vouloir poser aux institutions et aux évaluateurs qui viennent travailler avec elles. Ces dix questions sont disponibles aux liens indiqués ci-après.

https://evalpartners.org/evalnetworks/evalindigenous/

https://evalpartners.org/sites/default/files/10Qs4evaluatorsA4.pdf

LE CONTEXTE D'EVALINDIGENOUS

EvalIndigenous est un partenariat multi-acteurs formé dans le cadre des EvalPartners et fondé sur les connaissances et les expertises des peuples autochtones du monde entier. EvalIndigenous vise à sensibiliser, inclure et célébrer les traditions et valeurs culturelles, les langues, les pratiques de gouvernance juridique/politique ainsi que les modes de vie des peuples autochtones où qu'ils se trouvent. Notre objectif est de veiller à ce que les politiques et les pratiques d'évaluation des peuples autochtones soient basées sur l'équité, l'impartialité et la justice. La Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (2007) (UNDRIP) encadre notre travail, allant d'une attention fondée sur les éléments de preuve vers une compréhension globale partagée des bonnes pratiques des peuples autochtones et de nos droits dans le domaine de l'évaluation. La partie 1 de l'article 31 de l'UNDRIP déclare que les peuples autochtones ont le droit de conserver, contrôler et développer leur héritage culturel, leurs connaissances traditionnelles et les expressions culturelles traditionnelles ainsi que les manifestations de leurs sciences, technologies et cultures... Ils ont également le droit de conserver, contrôler, protéger et développer leur propriété intellectuelle sur un tel héritage culturel, les connaissances traditionnelles et les expressions culturelles traditionnelles.

POURQUOI EVALINDIGENOUS

Les programmes mis en œuvre dans les communautés autochtones sont évalués en utilisant des évaluateurs de passage. Ils ne connaissent pas les réalités culturelles, les protocoles et les contextes des communautés. Il est désormais temps que les peuples autochtones réclament leurs cadres et processus d'évaluation afin de renforcer et de rendre l'évaluation plus authentique dans les communautés autochtones et non autochtones. Il est temps de reconnaître ce qui a été fait pour réunir les deux visions du monde, afin de fournir une approche authentique en matière de sensibilisation culturelle.

John T. Njovu